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Date Sat, 28 Apr 2001 19:05:43 +0200
Subject globe_l: CE QUE l'OCCIDENT DEMANDE A LA SERBIE, ET RECIPROQUEMENT


VREME
8 mars 2001
(traduit par Persa Aligrudic)

CE QUE l'OCCIDENT DEMANDE A LA SERBIE, ET RECIPROQUEMENT

Un document confidentiel du Département d'Etat précise les trois points
sur
lesquels les USA attendent des réponses concrêtes : une collaboration en
ce
qui concerne la « remise des accusés pour les crimes de guerre », mais
aussi
le respect des droits des minorités ethniques, ainsi que l'arrêt des
paiements des salaires et des retraites des officiers de l'armée de la
Republika Srpska de Bosnie (RS) par les services financiers de la
Yougoslavie.

Par Dejan Anastasijevic

Le 31 mars le Congrès américain, conformément aux recommandations du
Département d'Etat et de la Maison blanche, devra décider si la RFY
remplit
les conditions pour continuer à recevoir l'aide américaine. De cette
décision dépend non seulement l'obtention de la centaine de millions de
dollars d'aide directe de Washington, mais aussi l'adhésion à la Banque
mondiale et au Fond monétaire international (FMI), ainsi que plusieurs
crédits qui nous ont été promis. Or, il semble que personne à Belgrade
ne s'
inquiète du fait que ce délai touche presque à sa fin. Comme un mauvais
élève habitué, à la fin de l'année, à ce que l'institutrice le fasse
toujours passer dans la classe suivante « pour ses beaux yeux », nos
dirigeants semblent convaincus que la lune de miel avec la communauté
internationale va se prolonger à l'infini.

IL SUFFIT DE PASSER LA RIVIERE PUIS D'ALLER DANS LA FORET : Le premier
point
sera le plus difficile à respecter. Malgré le discours, des
indiscrétions
diplomatiques suggèrent que l'Occident, pour le moment, n'insistera pas
sur
l'extradition de Milosevic, de Ratko Mladic ou du colonel Veselin
Sljivancanin, quoique toute action dans ce sens serait certainement
saluée.
A la place de cela, il serait suffisant d'envoyer quelques « petits
poissons », dont l'arrestation ne devrait pas provoquer trop de
réactions
locales. Les actes d'accusation scellés contre deux de ces « petits
poissons », accusés de crimes en Bosnie orientale, ont été remis par
Carla
Del Ponte lors de sa visite à Belgrade : il s'agit de citoyens de la RS,
peu
connus, et dont l'extradition ne devrait pas causer d'obstacles
juridiques.
Toutefois, cela représenterait déjà un très grand pas : un membre du
gouvernement de Serbie a récemment suggéré que ces deux hommes soient
discrètement  arrêtés et transférés en Bosnie, pour faire comme si
c'était
la SFOR qui les avait arrêtés, et non pas notre police. Cette solution
dans
le style « ménager la chèvre et le chou » pose problème : on demande à
la
Yougoslavie de collaborer avec le TPI ouvertement et officiellement, et
non
pas en secret,  même si cela arrangerait bien nos politiciens.
Malheureusement, le ministre fédéral de la Justice, Momcilo Grubac, a
déclaré cette semaine qu'une période de quatre à six mois sera
nécessaire
pour déposer la loi sur la collaboration avec le Tribunal, de sorte que
sera
dépassé non seulement le délai du Congrès américain mais aussi le
dernier
délai fixé par Carla Del Ponte. Elle a annoncé que, faute de
collaboration,
elle proposera dès avril au Conseil de sécurité des Nations Unies d'
instaurer de nouvelles sanctions contre la Yougoslavie. Du reste, Del
Ponte
envoie des signaux de tous côtés, déclarant que sa patience est à bout :

après sa visite à l'Union européenne, elle a déclaré dans une interview
à la
Radio suisse que le président Kostunica était un « nationaliste et un
homme
du passé ». Depuis Belgrade, elle a reçu de la bouche du conseiller pour
la
politique extérieure de Kostunica, Predrag Simic, la réponse « que pour
le
peuple serbe, ce que pense Carla Del Ponte n'est pas important ». Simic
a
également évoqué le cas de l'ancien dictateur du Chili, Pinochet, qui
 depuis des décennies est en liberté ». Un problème de la plus haute
importance pour l'avenir du pays est ainsi rabaissé au niveau du
commérage.

TEMPS PERDU : Simic et ceux qui pensent comme lui ont probablement
raison
lorsqu'ils estiment peu probable que le Congrès américain bloque l'aide
à la
Yougoslavie le 31 mars ou que le Conseil de sécurité vote de nouvelles
sanctions pour la Yougoslavie. Après le revirement d'octobre dernier, l'

Occident a trop vite et solidement embrassé la Yougoslavie pour la
rejeter
maintenant. Cependant, ces mêmes politiciens se trompent s'ils pensent
pouvoir ignorer à l'infini les requêtes du TPI en rencontrant toujours
la
même compréhension. En d'autres termes,  dès le mois d'avril, il faudra
que
la Yougoslavie rattrape les six mois perdus, ou bien des sanctions
seront
vraiment  prises. Il n'est pas obligatoire que ces sanctions passent par
le
Congrès ou par le Conseil de sécurité : le vice-président du
gouvernement
fédéral, Miroljub Labus, a rappelé il y a quelques jours, que la RFY a
actuellement une dette de 18 milliards de dollars, ce qui est absolument

insupportable pour un pays avec une situation économique comme la nôtre.
Par
conséquent, l'Occident n'est pas obligé de nous instaurer formellement
des
sanctions : il suffit de refuser une renégociation de la dette pour que
se
casse le bâton de mendiant sur lequel nous nous appuyons. Entre temps,
nos
dirigeants implorent la compréhension de l'Occident sur nos difficultés
subjectives et objectives et, à cet effet, elles exploitent de façon
exagérée les deux seuls atouts dont nous disposions véritablement : la
retenue de l'armée et de la police dans la vallée de Presevo, ainsi que
l'
amélioration des relations avec nos voisins. C'est grâce à ces deux
atouts
qu'il nous est permis encore une fois de dépasser les délais, mais ils
ne
seront bientôt plus valables.

La question des criminels de guerre se réduit, pour notre opinion, mais
aussi à l'étranger, au fait de déférer telle ou telle personne devant le

Tribunal. Les étrangers ne vivant pas ici, le nombre d'assassins qui se
promènent dans nos rues leur est vraisemblablement égal.

Mais pour nous qui vivons dans ce pays, la mise à l'écart de ces hommes
et
leur comparution devant la justice devraient être un objectif
prioritaire,
non pas à cause de Carla ou des crédits occidentaux, mais pour nous et
nos
enfants. D'ailleurs, la question des crimes de guerre commis contre les
autres peuples et celle des crimes « locaux », commis contre d'autres
Serbes, ne peuvent être traitée séparément. Récemment, un des homme
soupçonné d'avoir pris part à l'attentat en camion commis contre
Draskovic s
'est révélé être un milicien connu des « Tigres » d'Arkan et, plus tard,
des
« Bérets rouges ». Malgré les assurances du gouvernement qui prétend que
les
tribunaux locaux sont absolument en mesure de régler la question des
crimes
de guerre, les enquêtes tardent toujours à commencer. Il en va de même
pour
les autres conditions qu'il est indispensable de remplir afin que la RFY

soit finalement libérée de l'héritage de Milosevic. La privatisation, l'

introduction de l'Etat de droit et les réformes du système fiscal ne
sont
peut être pas liées à des délais particuliers ou des crédits, mais elles
ont
un lien direct avec la promesse de Kostunica de faire de la Serbie « un
pays
normal et ennuyeux ». Le temps des réformes s'écoule. Perdus dans le
brouillard, à nous demander quel était le moment fixé pour l'arrestation
de
Slobodan Milosevic et si la présentatrice de CNN Christiana Amanpur
allait
atterrir à Belgrade, nous avons quelque peu perdu de vue pourquoi nous
avons
voulu changer de régime. Les conséquences d'un échec face aux exigences
du
Congrès américain et de Carla Del Ponte ne seraient rien en regard des
conséquences d'un échec à satisfaire les espérances minimales des
citoyens
de Serbie. Jusqu'à présent, les uns et les autres ont manifesté plus de
patience que ce pouvoir pensait lui-même n'en mériter.




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